Pour mémoire, la jurisprudence s’est déjà prononcée sur la nécessité d’appliquer le principe de précaution au glyphosate, et plus généralement aux pesticides :
CAA de LYON, 3ème chambre, CRIIGEN, 29 juin 2021, 19LY01017 : « Par ailleurs, et contrairement à ce que prétend la société Bayer Seeds S.A.S., l’Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA) a elle-même expliqué les divergences existant entre son appréciation du risque inhérent au glyphosate et celle du CIRC notamment par la circonstance que ce dernier avait pu tenir compte, non de cette seule substance active, mais de l’ensemble de la formulation des produits étudiés, ainsi qu’il ressort de sa note ” L’évaluation des risques expliquée par l’EFSA : Glyphosate “. Loin d’écarter le bien-fondé des analyses du CIRC, cette même note préconise dès lors que ” la toxicité de chaque formulation de pesticides, et en particulier de son potentiel génotoxique, fasse l’objet d’un examen plus approfondi et soit abordée par les autorités des Etats membres lorsqu’elles réévalueront l’utilisation des formulations contenant du glyphosate sur leurs territoires “, admettant ainsi l’éventualité d’un risque accru en cas d’utilisation du glyphosate combiné à d’autres coformulants. Dans ces circonstances, et nonobstant le sens des avis ultérieurement émis et les évaluations qui ont pu être faites en 2016 par les autorités d’Etats non européens comme le Japon, la Nouvelle-Zélande ou l’Australie, lesquelles sont seulement de nature à confirmer l’absence de consensus scientifique à ce sujet, l’ensemble de ces éléments étaient de nature à accréditer l’hypothèse d’un risque d’atteinte à l’environnement, lié à l’usage du glyphosate mais aussi à l’association de celui-ci à d’autres coformulants dans des préparations, susceptible de nuire de manière grave à la santé, à la date de la décision litigieuse, et justifiaient, en dépit des incertitudes subsistant quant à sa réalité et à sa portée en l’état des connaissances scientifiques, l’application du principe de précaution ».
Pour lire la décision complète : CAA de LYON, 3ème chambre, 29/06/2021, 19LY01017, Inédit au recueil Lebon – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
Cour de justice de l’Union européenne, grande chambre, 1er octobre 2019, arrêt Blaise, C-616/17 : « 41. Il importe de relever, à titre liminaire, que, si l’article 191, paragraphe 2, TFUE prévoit que la politique de l’environnement est fondée, notamment, sur le principe de précaution, ce principe a également vocation à s’appliquer dans le cadre d’autres politiques de l’Union, en particulier de la politique de protection de la santé publique ainsi que lorsque les institutions de l’Union adoptent, au titre de la politique agricole commune ou de la politique du marché intérieur, des mesures de protection de la santé humaine (voir, en ce sens, arrêts du 2 décembre 2004, Commission/Pays-Bas, C‑41/02, EU:C:2004:762, point 45 ; du 12 juillet 2005, Alliance for Natural Health e.a., C‑154/04 et C‑155/04, EU:C:2005:449, point 68, ainsi que du 22 décembre 2010, Gowan Comércio Internacional e Serviços, C‑77/09, EU:C:2010:803, points 71 et 72).
42. Il incombe donc au législateur de l’Union, lorsqu’il adopte des règles régissant la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques, telles que celles énoncées par le règlement no 1107/2009, de se conformer au principe de précaution, en vue notamment d’assurer, conformément à l’article 35 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi qu’à l’article 9 et à l’article 168, paragraphe 1, TFUE, un niveau élevé de protection de la santé humaine (voir, par analogie, arrêt du 4 mai 2016, Pillbox 38, C‑477/14, EU:C:2016:324, point 116).
43. Ce principe implique que, lorsque des incertitudes subsistent quant à l’existence ou à la portée de risques pour la santé des personnes, des mesures de protection peuvent être prises sans avoir à attendre que la réalité et la gravité de ces risques soient pleinement démontrées. Lorsqu’il s’avère impossible de déterminer avec certitude l’existence ou la portée du risque allégué, en raison de la nature non concluante des résultats des études menées, mais que la probabilité d’un dommage réel pour la santé publique persiste dans l’hypothèse où le risque se réaliserait, le principe de précaution justifie l’adoption de mesures restrictives (voir, en ce sens, arrêts du 22 décembre 2010, Gowan Comércio Internacional e Serviços, C‑77/09, EU:C:2010:803, points 73 et 76 ; du 17 décembre 2015, Neptune Distribution, C‑157/14, EU:C:2015:823, points 81 et 82, ainsi que du 22 novembre 2018, Swedish Match, C‑151/17, EU:C:2018:938, point 38).
44. À cet égard, il ressort du considérant 8 et de l’article 1er, paragraphe 4, du règlement no 1107/2009 que les dispositions de ce règlement se fondent sur le principe de précaution et que celles-ci n’empêchent pas les États membres d’appliquer ce principe lorsqu’il existe une incertitude scientifique quant aux risques concernant la santé humaine ou animale ou l’environnement que représentent les produits phytopharmaceutiques devant être autorisés sur leur territoire ».
Pour lire la décision complète : EUR-Lex – 62017CJ0616 – EN – EUR-Lex (europa.eu)
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