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Polluants éternels très inquiétants, les PFAS soumis à une consultation publique européenne

Suite à la consultation lancée par l’Agence européenne des produits chimiques, l’avocate Madeleine Babes lance un appel à contribution, pour lutter contre ces substances dangereuses, dont la présence nocive et omniprésente commence à alarmer en haut lieu.

Publié le 04/04/2023 dans https://www.actu-environnement.com/

Les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), essentiellement utilisées depuis la Seconde Guerre mondiale, rassemblent des milliers de produits chimiques et constituent ce que l’on appelle des polluants éternels, extrêmement persistants dans l’environnement, que ce soit dans l’eau, dans l’air ou dans les sols. Ces substances chimiques ont la particularité d’être antiadhésives, imperméabilisantes et résistantes aux fortes chaleurs. Elles s’avèrent être une source de pollution non négligeable, avec des conséquences directes sur la santé des populations.

On en retrouve dans les produits du quotidien comme l’agroalimentaire (dans les emballages notamment), les produits ménagers, les textiles ou l’électronique, mais également dans les produits de lutte contre les incendies ou dans le domaine de l’automobile et de la construction. Les PFAS se retrouvent donc en réalité un peu partout autour de nous. À titre d’illustration d’ailleurs, une étude récente menée par Oxford, met en lumière des niveaux inquiétants de PFAS dans la glace de l’Arctique norvégien, ce qui présente évidemment des risques pour les écosystèmes et la biodiversité.

De l’enquête à la consultation publique européenne

Une enquête publiée par le journal Le Monde, le 23 février dernier, a suscité de vives réactions : « Pendant près d’un an, Le Monde a enquêté avec des journalistes de 17 médias partenaires pour tenter de mesurer l’ampleur de cette contamination en Europe. D’après notre estimation prudente, fondée sur des milliers de prélèvements environnementaux, l’Europe compte plus de 17 000 sites contaminés à des niveaux qui requièrent l’attention des pouvoirs publics (au-delà de 10 nanogrammes par litre). La contamination y atteint des niveaux jugés dangereux pour la santé par les experts que nous avons interrogés (plus de 100 nanogrammes par litre) dans plus de2 100‘hot spots de contamination’. »

Si le sujet n’est pas nouveau, il devient néanmoins urgent de le traiter.

En effet, comme le souligne l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA), « le nettoyage des sites pollués est techniquement difficile et coûteux. Si elles continuent à être rejetées, elles ne cesseront de s’accumuler dans l’environnement, dans l’eau potable et dans les aliments ».

Forts de ces précisions, l’Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas, la Suède et la Norvège ont lancé un projet européen de restriction universelle de toutes les PFAS.

Depuis le 22 mars dernier, et jusqu’au 25 septembre prochain, une consultation publique européenne est organisée par l’ECHA. Elle est ouverte à tous, aussi bien les particuliers que les entreprises, les associations, les personnes publiques… Plus précisément, la consultation porte sur la restriction de la fabrication, de mise sur le marché et d’utilisation des PFAS.

Les contributions peuvent être déposées sur le site de l’ECHA.

La volonté politique française concernant l’accès à l’eau

L’actualité européenne sur la question des PFAS reçoit un écho aussi en France qu’au niveau international.

En France, depuis le 1er janvier dernier, de nouvelles exigences sont posées en matière de potabilité de l’eau. Cette nouvelle réglementation, issue de la directive européenne « eau potable » a été transposée en droit interne par différents textes aux portées normatives hétéroclites :

l’ordonnance n° 2022-1611 du 22 décembre 2022 relative à l’accès et à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine ;

– le décret n° 2022-1720 du 29 décembre 2022 relatif à la sécurité sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine ;

– le décret n° 2022-1721 du 29 décembre 2022 relatif à l’amélioration des conditions d’accès de tous à l’eau destinée à la consommation humaine ;

– une multitude d’arrêtés du 30 décembre 2022.

Par ailleurs, la France est désormais dotée d’un plan d’actions ministériel sur les PFAS pour la période 2023-2027. Dévoilé en janvier 2023, il prévoit six axes majeurs pour comprendre ces polluants éternels.

Et le Ministre de la Transition écologique d’affirmer, qu’« au regard des préoccupations grandissantes concernant l’impact des PFAS sur la santé humaine et celle des écosystèmes, une action ministérielle forte est nécessaire pour répondre aux aspirations des français. Il s’agit dans un premier temps de mieux connaître ces substances dans l’environnement, les quantifier et les mesurer, et ensuite de mettre en place des actions de réduction à la source chez les principaux émetteurs. Ce plan d’action s’insère en outre dans les travaux européens qui visent à interdire l’usage de ces substances, pour une meilleure protection globale de l’environnement ».

Plus en détails, les six axes majeurs se déclinent de la manière suivante :

– Axe d’action 1 : Disposer de normes sur les rejets et les milieux pour guider l’action publique ;

– Axe d’action 2 : Porter au niveau européen une interdiction large pour supprimer les risques liés à l’utilisation ou la mise sur le marché des PFAS ;

– Axe d’action 3 : Améliorer la connaissance des rejets et de l’imprégnation des milieux, en particulier des milieux aquatiques, pour réduire l’exposition des populations ;

– Axe d’action 4 : Réduire les émissions des industriels émetteurs de façon significative. Sur ce plan, le site Arkema de Pierre-Bénite dans le Rhône sera préfigurateur de cette démarche d’identification et de diminution des rejets de PFAS. Mais il faut également citer, dans un domaine « non industriel », que la Direction générale de l’Aviation civile invitera les principales plates-formes aéroportuaires à mener un diagnostic d’éventuelles pollutions aux PFAS dans les rejets ou dans les sols, notamment au regard de l’usage historique de certaines mousses anti-incendie (qui sont reconnues comme étant des PFAS).

– Axe d’action 5 : La transparence sur les informations disponibles ;

– Axe d’action 6 : Une intégration, à moyen terme dans le plan micro-polluants (envisagé pour la fin du premier semestre 2023).

USA et Canada s’illustrent par leurs décisions

Au Canada,le 11 février dernier, Santé Canada a proposé les lignes directrices pour les PFAS dans l’eau potable qui sont 50.000 à 300.000 fois plus élevés que les avis de santé de l’Agence environnementale de Santé.

Aux États-Unis, les constats de la présence des PFAS dans l’environnement sont tout aussi alarmants. À titre d’illustration, il a récemment été révélé que« pendant plus de 30 ans, Chemours et avant eux DuPont, ont déversé des quantités incalculables de PFAS (…) dans l’air, le sol et les eaux de la région de Cape Fear. Il en a résulté la contamination de l’eau potable d’environ 1 habitant de la Caroline du Nord sur 15 par des produits chimiques, liés à divers problèmes de santé, dont le cancer ».

Face à la situation inquiétante de la pollution de l’environnement par les PFAS, certaines communes ou États s’illustrent par les mesures prises. C’est notamment le cas de l’État de Washington et de la ville de San Francisco, qui ont pris des mesures pour limiter l’utilisation des PFAS dans les emballages alimentaires. Autre exemple, Eau Claire, une ville du Wisconsin, qui a retrouvé des PFAS dans ses puits il y a quelques années. Et même si la présence de PFAS dans l’eau de la ville est en dessous des seuils fixés au niveau fédéral, la ville a décidé de faire plus et d’améliorer la qualité de son eau, au-delà de ce que prévoit la réglementation, grâce à un financement fédéral obtenu par une sénatrice.

Des mesures dans l’intérêt de la population, qui inspireront peut-être en France et en Europe. Les résultats de la consultation publique européenne devront être analysés avec attention.

La réflexion avance et s’enrichit sur les PFAS. Sans doute le temps est-il venu désormais d’avancer davantage en appliquant le principe pollueur-payeur et d’envisager que les producteurs de ce type de substances voient leur responsabilité engagée.

Lire l’article en ligne : ICI

Madeleine Babes, Avocate à la Cour | Cabinet Huglo Lepage Avocats

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